Confinement périurbain
Le dimanche 15 mars 2020, nous quittions notre appartement parisien pour nous réfugier dans l’espace périurbain de Lagny-sur-Marne, chez mes beaux-parents. L’épidémie du Covid – le virus était alors encore masculin – explosait et les informations qui nous parvenaient, bien que contradictoires, nourrissaient la crainte d’un blocus de Paris et d’un confinement dans notre appartement montmartrois qui ne nous disait rien qui vaille, surtout pour une durée indéterminée. C’est presque sur un coup de tête que nous décidions en fin d’après-midi de partir en bouclant dans la précipitation nos valises, sans oublier d’attraper un appareil photo et quelques pellicules. Deux jours après, le 17 mars, il aurait été trop tard. Ce n’est que le 14 mai, trois jours après la fin du confinement, que je retrouverai Paris, précédant le reste de la famille de peu, pour voir à « quoi » s’attendre. Entre-temps, des heures d’hébétude devant le spectacle d’un monde partagé entre peur, épidémie, paralysie, prolifération de malades et engagement des soignants et « volontaires » de la première ligne ; l’installation d’une routine cloitrée entre ravitaillements masqués et cuisine réparatrice, séances de travail à distance et de jeu avec mon fils, apéritifs et repas familiaux devenus quasi cultuels, litanie journalistique des contaminations et morts quotidiens, films et lectures, sommeil et lassitude, observation monomaniaque du jardin mi-clos et émerveillement face à une nature domestiquée qui, libérée de l’activité humaine habituelle, semblait s’éveiller forte d’une plénitude sans commune mesure avec ce qui lui était promis par les printemps précédents.